Pont-de-Beauvoisin
Des conventions douanières liaient durablement le sort du Pont-de-Beauvoisin au dace de Suze en période de paix. En 1656, le duc Charles-Emmanuel autorisa les Fermiers généraux à établir des commis à Suze et à Chambéry pour lutter contre la contrebande (patentes du 12 février). Inversement, des commis du dacier étaient autorisés à résider à Lyon. Les employés des deux « douanes » avaient même autorité pour les saisies et confiscations. En outre, les fermiers généraux obtinrent à cette époque d’entretenir gardes et commis en Bresse, Bugey, pays de Gex à condition de recevoir du dacier 3 livres tournois par balle ou caisse de draps ou soieries qui passait par la route Suze-Pont-de-Beauvoisin. Le duc de Savoie était attaché à la recette de sa douane qui rapportait plus de 5 000 écus d’or d’Italie par an au milieu du XVIIe siècle (le bail pour 1674-1678 fut établi pour le prix de 28 000 écus). D’autres passages demeuraient possibles, notamment par Collonges et Genève, ce que le duc craignait. En 1698, un arrêt (5 novembre) ouvrit le passage par le village de Dortan.
La liste des denrées issues des états sardes (valeur en livre poids) et enregistrées au Pont-de-Beauvoisin pour l’année 1725-1726 fait apprécier la grande diversité des échanges dominés par le riz et les fromages: Bruyères (150 livres poids), boutons (175), bois travaillés (1320), Chandelles (100), chocolat (70), chocolat et sorbet (190), cornes (1 200), cuivre (15), cuivre laiton (85), cuirs (4 pièces), cuirs en poil (100 livres poids), chairs salées (500), chairs et poissons (157), cristaux ouvrés (9), chapeaux (80), dentelles (60), dentelles du Puy (59), drogueries (1 353 de toutes), eaux de liqueurs (125), eaux de vie (2 139), étoffes de soie (5125), fer (825), fer en gros (3 305), fromages (3 305), fromages et beurre (24 731), faïence (77), fruits frais (8 597), fruits secs (3780), fruits communs (50), graines de jardin (1589), mercerie (10), mercerie ordinaire (392), noix (3 225), ouvrages de soie (14), pierres à aiguiser (745), poix blanche (125), peaux de moutons (18 peaux), pelleteries (306 livres), quincailleries (2310 livres), riz (95 556 livres), sucres et confitures (881), toiles (321), tableaux (8), terrailles communes (1 200 livres), vins et vinaigre (16 barreaux), vernis de terre (450 livres), viande de pâté (150). Les droits levés sur ces marchandises montèrent cette année-là à 2 046 livres et 4 sous.
Au XVIIIe siècle, les habitants tiraient profit de cette situation frontalière en faisant des magasins frauduleux de toutes sortes de marchandises, notamment celles arrivées du Levant ou des colonies comme les toiles peintes et imprimées prohibées en France. L’endroit était donc une plaque tournante de la contrebande. Le nombre de contrebandiers en activité entre le Pont-de-Beauvoisin et la Savoie frôlait la centaine en permanence. La mise en place d’une brigade de la maréchaussée et d’un corps de gardes de la Ferme générale, côté français, ne diminua guère les trafics tant ils étaient tolérés par la cour de Turin, côté Savoie. En 1777, Louis XVI fit donc interdire tout entrepôt et établit un bureau d’enregistrement des acquits de paiement pour toutes les marchandises d’origine étrangère ou en transit dans le bourg, en prenant modèle sur les mesures adoptées pour Aix-en-Provence en 1751. Le bureau douanier du Pont-de-Beauvoisin appartenait à une ligne de contrôle qui comprenait du Nord au Sud : Challonges, Seyssel, Belley ; et plus à l’Est : Pontcharra, Chapareillan, La Chapelle du Bard.
Sources et références bibliographiques:
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Sources archivistiques:
- Archivio di Stato di Turino, Materie economiche, Dacito di Susa, Mazzo 2, fascicule 22, f° 720 et suivants.
- Archivio di Stato di Turino, Materie economiche, Dacito di Susa, Mazzo 4, fascicule 18, f° 893 et suivants.
- AD Isère, 2C 635 : Etat des marchandises venues des Etats du Roy de Sardaigne pendant la sixième année du bail de Bourgois (1725-1726).
Pont-de-Beauvoisin » (2023) in Marie-Laure Legay, Thomas Boullu (dir.), Dictionnaire Numérique de la Ferme générale, https://fermege.meshs.fr.
Date de consultation : 22/12/2024
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