Arnaud Le Gonidec
Le nombre d’officiers royaux varie suivant
l’étendue du ressort de la juridiction. Celle des aides de
Paris compte trois chambres, chacune avec trois présidents
et respectivement dix-huit, seize et douze conseillers :
un procureur général, trois avocats généraux, quatre
substituts, deux greffiers en chef, un nombre variable de
secrétaires, greffier et huissiers. Héréditaires et
patrimoniales, ces offices assurent l’indépendance des
magistrats qui, « dépositaires et gardiens des lois »,
vérifient et enregistrent la législation fiscale et les
baux des fermiers. Dans la seconde moitié
du XVIIIe siècle, le droit de remontrances est
utilisé par les cours souveraines comme une arme
offensive dirigée contre la Ferme générale et le «
despotisme des administrateurs ».
Les cours des aides
disposent également de larges attributions
judiciaires. Justices déléguées d’attribution
compétente pour le droit des fermes, elles reçoivent les
appels interjetés des sentences des juges des traites et maîtres des ports, des grenetiers, des
officiers des bureaux des finances, des juges de la marque des fers et des élus. Elles connaissent en
outre en première et dernière instance, à l’exclusion des
autres cours, « tous débats différens concernant
l’administration des Finances » (édit mars 1551) dont le calcul,
l’audition et la clôture des comptes appartiennent à la Chambre des
comptes, à savoir le paiement des débets ainsi que les
exécutoires et, par conséquent, les ventes d’immeubles,
privilèges et hypothèques qui concernent les comptables
des deniers royaux : trésoriers, receveurs généraux et
particuliers, commis et cautions. Elles peuvent ainsi perquisitionner les biens de
tous les comptables et gens d’affaires du royaume ainsi
que le patrimoine de leurs héritiers. De même, seules les
cours des aides peuvent recevoir les contestations entre
fermiers, sous-fermiers, munitionnaires, entrepreneurs des vivres et
étapes, leurs associés, croupiers, cautions, commis « et autres intéressés » pour raison de
leurs fermes, sous-fermes, traités et munitions,
transports et associations. Défense est faite à
toute autre cour souveraine, Parlement ou Chambre
des comptes, de connaître des droits des fermes, à
peine de nullité de procédure, de condamnation aux
dépens, dommages et intérêts, et d’une amende de
3000 livres.
Certains territoires d’acquisition récente, comme les
provinces du Nord, ne relèvent pas du ressort de la Cour
des aides dont les compétences sont attribuées aux cours
souveraines de droit commun, sinon au Conseil du roi. Les
impôts indirects nouvellement créés, comme les droits réunis, échappent
également à sa juridiction au profit des intendants de
provinces. Si la procédure suit les règles de droit commun
édictées au titre XI de l’ordonnance civile d’avril 1667, la déclaration du 2
octobre 1694 déroge au principe
de la récusation des juges des aides qui désormais prendre part au jugement de leurs
parents ou alliés « intéressés dans lesdites Fermes ».Au
criminel, les cours des aides répriment les crimes et
délits en violation de la législation fiscale dont les
malversations, concussions et vexations des commis des fermes. « Juges
naturels de toute espèce de contrebande dépositaires des
Loix qui la répriment » selon le premier Président de
Malesherbes, les officiers des cours des aides sont
« dépouillés » de cette compétence avec l’érection de commissions
extraordinaires chargées de juger souverainement des cas
de fraude et de contrebande, principalement du sel et du tabac. Les cours des aides exercent enfin des
fonctions règlementaires. Souveraines, elles prennent des
arrêts de règlement encadrant le bon fonctionnement des
juridictions de premier degré avec pour objectif constant
de contenir le droit des fermes. Par exemple,
Louis-Achille Dionis du Séjour est le rapporteur de
l’arrêt du 4 septembre 1765
portant règlement pour les greniersà sel du Lyonnais les lieux, ils laissaient les receveurs des fermes
« seuls maîtres de mesurer au peuple le sel ». Après avoir
dénoncé cet usage comme « absolument abusif », la Cour
statue sur la forme des registres et des procès-verbaux
représentés par les commis aux officiers royaux à
l’exemple du procès-verbal de la descente de sel qui doit
indiquer l’emplacement de chaque masse dans les greniers, la qualité du sel,
la perte souffert pendant le transport, l’itinéraire
emprunté par le voiturier. Après avoir visé ces
documents, les grenetiers sont sommés d’adresser leurs
expéditions à la Cour des aides et à la juridiction des
gabelles. L’arrêt ordonne en outre l’apposition sur chaque
grenier de « deux
serrures différentes » dont une clé sera remise au commis
receveur et la
seconde à l’officier contrôleur, rendant ainsi obligatoire la présence de ce
dernier pour que le grenier puisse fonctionner. Les
exemples démontrant que la Cour des aides avait à cœur de
contrôler l’exercice des commis peuvent être multipliés, à
l’image de l’arrêt de janvier 1788
qui ordonnait aux officiers de l’élection de
Senlis de viser tous les registres des
commis et de procéder à l’évaluation du prix commun des
boissons. L’opposition parlementaire, outre les grandes
remontrances, se confirme ainsi dans les arrêts de
règlement.
Sources et références bibliographiques:
Arnaud Le Gonidec, « Cour des aides » (2023) in Marie-Laure Legay, Thomas Boullu (dir.), Dictionnaire Numérique de la Ferme générale, https://fermege.meshs.fr.
Date de consultation : 20/05/2024
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