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Cour des aides

Arnaud Le Gonidec





Juridiction souveraine en matière de finances extraordinaires, les cours des aides sont au dernier siècle de l’Ancien Régime au nombre de treize dont quatre ont une existence autonome, à savoir Paris, Clermont, Bordeaux et Montauban. Les neuf autres sont réunies à une autre juridiction : à la Chambre des comptes pour Aix, Montpellier et Rouen ou au Parlement pour Besançon, Grenoble, Metz, Pau et Rennes. La Cour des aides de Dijon est rattachée successivement à l’une puis à l’autre des deux juridictions. L’ensemble des pays d’aides, c’est-à-dire les 14 généralités qui supportent l’essentiel des droits d’aides, est compris dans les ressorts des cours normande (généralités de Caen, Alençon et Rouen) et parisienne (généralités de Paris, Amiens, Soissons, Chalons, Lyon, Bourges, Moulins, Tours, Orléans, Poitiers et La Rochelle), d’où l’intérêt fiscal de ces deux cours et l’importance du nombre des contentieux qu’elles connaissent.

Le nombre d’officiers royaux varie suivant l’étendue du ressort de la juridiction. Celle des aides de Paris compte trois chambres, chacune avec trois présidents et respectivement dix-huit, seize et douze conseillers : un procureur général, trois avocats généraux, quatre substituts, deux greffiers en chef, un nombre variable de secrétaires, greffier et huissiers. Héréditaires et patrimoniales, ces offices assurent l’indépendance des magistrats qui, « dépositaires et gardiens des lois », vérifient et enregistrent la législation fiscale et les baux des fermiers. Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, le droit de remontrances est utilisé par les cours souveraines comme une arme offensive dirigée contre la Ferme générale et le « despotisme des administrateurs ».

Les cours des aides disposent également de larges attributions judiciaires. Justices déléguées d’attribution compétente pour le droit des fermes, elles reçoivent les appels interjetés des sentences des juges des traites et maîtres des ports, des grenetiers, des officiers des bureaux des finances, des juges de la marque des fers et des élus. Elles connaissent en outre en première et dernière instance, à l’exclusion des autres cours, « tous débats différens concernant l’administration des Finances » (édit mars 1551) dont le calcul, l’audition et la clôture des comptes appartiennent à la Chambre des comptes, à savoir le paiement des débets ainsi que les exécutoires et, par conséquent, les ventes d’immeubles, privilèges et hypothèques qui concernent les comptables des deniers royaux : trésoriers, receveurs généraux et particuliers, commis et cautions. Elles peuvent ainsi perquisitionner les biens de tous les comptables et gens d’affaires du royaume ainsi que le patrimoine de leurs héritiers. De même, seules les cours des aides peuvent recevoir les contestations entre fermiers, sous-fermiers, munitionnaires, entrepreneurs des vivres et étapes, leurs associés, croupiers, cautions, commis « et autres intéressés » pour raison de leurs fermes, sous-fermes, traités et munitions, transports et associations. Défense est faite à toute autre cour souveraine, Parlement ou Chambre des comptes, de connaître des droits des fermes, à peine de nullité de procédure, de condamnation aux dépens, dommages et intérêts, et d’une amende de 3000 livres.

Certains territoires d’acquisition récente, comme les provinces du Nord, ne relèvent pas du ressort de la Cour des aides dont les compétences sont attribuées aux cours souveraines de droit commun, sinon au Conseil du roi. Les impôts indirects nouvellement créés, comme les droits réunis, échappent également à sa juridiction au profit des intendants de provinces. Si la procédure suit les règles de droit commun édictées au titre XI de l’ordonnance civile d’avril 1667, la déclaration du 2 octobre 1694 déroge au principe de la récusation des juges des aides qui désormais prendre part au jugement de leurs parents ou alliés « intéressés dans lesdites Fermes ».Au criminel, les cours des aides répriment les crimes et délits en violation de la législation fiscale dont les malversations, concussions et vexations des commis des fermes. « Juges naturels de toute espèce de contrebande dépositaires des Loix qui la répriment » selon le premier Président de Malesherbes, les officiers des cours des aides sont « dépouillés » de cette compétence avec l’érection de commissions extraordinaires chargées de juger souverainement des cas de fraude et de contrebande, principalement du sel et du tabac. Les cours des aides exercent enfin des fonctions règlementaires. Souveraines, elles prennent des arrêts de règlement encadrant le bon fonctionnement des juridictions de premier degré avec pour objectif constant de contenir le droit des fermes. Par exemple, Louis-Achille Dionis du Séjour est le rapporteur de l’arrêt du 4 septembre 1765 portant règlement pour les greniersà sel du Lyonnais les lieux, ils laissaient les receveurs des fermes « seuls maîtres de mesurer au peuple le sel ». Après avoir dénoncé cet usage comme « absolument abusif », la Cour statue sur la forme des registres et des procès-verbaux représentés par les commis aux officiers royaux à l’exemple du procès-verbal de la descente de sel qui doit indiquer l’emplacement de chaque masse dans les greniers, la qualité du sel, la perte souffert pendant le transport, l’itinéraire emprunté par le voiturier. Après avoir visé ces documents, les grenetiers sont sommés d’adresser leurs expéditions à la Cour des aides et à la juridiction des gabelles. L’arrêt ordonne en outre l’apposition sur chaque grenier de « deux serrures différentes » dont une clé sera remise au commis receveur et la seconde à l’officier contrôleur, rendant ainsi obligatoire la présence de ce dernier pour que le grenier puisse fonctionner. Les exemples démontrant que la Cour des aides avait à cœur de contrôler l’exercice des commis peuvent être multipliés, à l’image de l’arrêt de janvier 1788 qui ordonnait aux officiers de l’élection de Senlis de viser tous les registres des commis et de procéder à l’évaluation du prix commun des boissons. L’opposition parlementaire, outre les grandes remontrances, se confirme ainsi dans les arrêts de règlement.





Sources et références bibliographiques:

    Sources archivistiques:
  • AN, G1 100 (6) : arrêt de la cour des aides du 4 septembre 1765 portant règlement pour le grenier du Lyonnais.
  • AN, G1 91 (44) : état des jugements rendus par les conseillers de la cour des aides, commissaires du roi à Saumur.
  • AN, G2 18 (16) : Motifs de la cour des aides envoyés par le procureur général au contrôleur générale entre 1782 et 1787.
  • AN, G2 182/2 (30) : arrêt de la cour des aides déclarant bons et valables le procès-verbal et la saisie faits sur J. Salomon tanneur à Amboise.
  • AN, G2 179 (11) : arrêt de la cour des aides condamnant Sylvain et Jean Pinot au carcan pour fraude et rébellion.
  • AN, G2 197 (55) : arrêt de la cour des aides du 2 janvier 1788 ordonnant que les officiers de Senlis seront tenus de parapher tous les registres nécessaires à la perception des droits et de procéder à l’évaluation du prix communs des boissons.
  • AN Z1a 471 : extraits d’ordonnances, d’arrêts et de règlements concernant les fermes, 1465-1770.

    Sources imprimées:
  • Édit de mars 1551 portant établissement d’une seconde chambre à la cour des aides de Paris et Déclaration du roi du 10 août 1748 servant de règlement pour la Cour des aides de Paris, dans Nouveau code des tailles ou recueil des ordonnances, édits, déclarations, règlements et arrêts rendus, tant sur cette matière et autres impositions, que sur la Jurisprudence qui s’observe dans les Cours des aides et les élections, 4e éd., 1761, t. 3, p. 70-82 et p. 595-604.
  • Dictionnaire de jurisprudence et des arrêts, t. 3, éd. 1783, v° « aides » p. 648-658.
  • D. Diderot et J. d’Alembert, Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers, 1751, t. 4, v° « cour des aides » p. 355-372.
  • Encyclopédie méthodique. Jurisprudence, 1783, t. 3, v° « cour des aides » p. 378-392.
  • J.-L. Lefebvre de La Bellande, Traité général des droits d’aides, 1760, t. 2, p. 250-265.


    Bibliographie scientifique:
  • S. Clémencet, « Cour des Aides de Paris Z1a », dans Guide des recherches dans les fonds judiciaires de l'Ancien Régime aux Archives nationales, Paris, 1958, p. 223-233.
  • G. Dupont-Ferrier, Nouvelles études sur les institutions financières de la France à la fin du Moyen Âge : les origines et le premier siècle de la Chambre ou Cour des aides de Paris, Paris, 1933.
  • D. Bège, Une compagnie à la recherche de sa raison d'être, la Cour des aides de Guyenne et ses magistrats, 1553-1790, thèse de doctorat, Droit, Paris 1, 1974, dact.
  • F. Hébert, La Cour des aides de Paris sous l’Ancien Régime, Thèse de droit, Paris, 1965, dact., 3 vol.
  • D. Ligou, « La cour des Aides de Montauban à la fin du XVIIIe », Annales du Midi. Revue archéologique, historique et philologique de la France méridionale, t. 64, n°20, 1952, p. 297-324.
  • C. Mengès-Le Pape, La Cour des aides et finances de Montauban : 1642-1790. Thèse soutenue en 1991 à Toulouse 1, dact., 3 vol.




Citer cette notice:

Arnaud Le Gonidec, « Cour des aides » (2023) in Marie-Laure Legay, Thomas Boullu (dir.), Dictionnaire Numérique de la Ferme générale, https://fermege.meshs.fr.
Date de consultation : 22/12/2024
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