Receveur particulier
Les caisses des receveurs locaux
étaient régulièrement volées. Leur responsabilité
juridique était alors engagée. Il ne pouvait faire porter
la perte au roi ou à l’adjudicataire. La Cour des aides de Paris
débouta en ce sens le receveur du grenier de Rethel -Mazarin (arrêt du 22 décembre 1706). Un receveur devait veiller à la
sûreté de sa caisse et de son transport. En cas d’absence,
il pouvait se faire représenter par sa femme. Inversement,
un receveur des Fermes ne pouvait être personnellement
poursuivi pour raison des condamnations prononcées contre
l’adjudicataire.
Plusieurs arrêts comme celui du 6 décembre 1757 ou du 26 novembre 1776 confirmaient sa
protection. Lorsque les juges de l’élection d’Avranches
condamnèrent Jean-Baptiste Guérin de Vitry, receveur des
gabelles au même
lieu à 6 000 livres de dommages et intérêts pour une
affaire de saisie de faux-sel, et qu’ils prononcèrent la
prise et vente de ses biens meubles, ils se firent
rappeler à l’ordre par le Conseil du roi. Non seulement le
receveur ne pouvait supporter aucune condamnation
personnelle dans ce type d’affaires, mais la mise en vente
de ses meubles et linges par l’huissier de la cour de
justice fut jugée « injurieuse et tortionnaire ». Plus
généralement, il faut noter que les circonstances liées au
développement du banditisme fit évoluer la législation en faveur du receveur.
Lorsque le ministre Choiseul fut informé du vol de 8 à 10
000 livres, tant en argent qu’en effets, chez divers
particuliers dont le receveur des traites et le contrôleur
des actes, par dix contrebandiers
venus de Suisse, il convint
de l’importance d’une protection armée.
Les lois des 5 mai
1690, 14 juillet 1699 et 3 juin 1707 condamnaient un receveur à
mort en cas de divertissement pour une somme supérieure à
3 000 livres. De même, les cas de péculat et
prévarication, encore nombreux à la fin du XVIIe et au
début du XVIIIe siècle, étaient sévèrement punis. Buinand,
receveur des greniers de
Charlieu et La Clayette, dans le Lyonnais, pratiqua pendant douze ans le
faux-saunage en tirant du sel des Dombes, et agit inconséquemment : « il ouvre
et ferme et distribue le sel quand il veut au peuple et ne
fait pas la mesure juste et nécessaire, la fesant comme
bon lui semble dans des demys minots et des quarts en son
particulier et non en présence du peuple et fait la
distribution dans des bennes où il les a mises et
entreposées, telles qu’il les a voulu mesurer parce qu’il
n’y a aucun officier audits greniers », constata le
fermier des gabelles en
1714. Buinand était par
ailleurs juge pour le compte du seigneur de Charlieu, ce
qui expliquait l’impunité dont il bénéficiait. Il fut
condamné à la pendaison. Un receveur des traites de Vichy,
Chartier, abusa pendant neuf ans de sa place pour réclamer
des droits aux marchands et voituriers passant la rivière
de l’Allier : il leur réclamait des billets à son profit.
Il fut condamné à mort en 1717
…etc. Les cas d’ententes entre receveur et marchands sont
encore signalés au cours du XVIIIe siècle : en 1760, les receveurs des
bureaux de traites de
Coligny, Cormoz et Thoirette, situés en Bresse, furent
rappelés à l’ordre pour leur intelligence avec les
marchands qui se rendaient aux foires du pays : la levée
des droits d’entrée et de sortie n’était pas strictement
appliquée. Moins graves, mais encore fréquents dans la
première moitié du XVIIIe siècle, étaient leurs
manquements à l’égard de la tenue des registres, relevés par
les inspecteurs des
fermes. Les receveurs des aides devaient suivre avec précision l’enregistrement des
états collationnés des commis aux exercices dans des
sommiers, reporter avec soin les quittances de paiement
des droits ; on attendait la même rigueur des receveurs
des traites pour
l’inscription des décharges des acquit-à-caution. Le receveur des tabacs
devait enregistrer soigneusement dans des livres portatifs
l’espèce, le poids, le prix à la livraison. En cas
d’omission de report de recette, le receveur était le plus
souvent condamné au quadruple.
Sources et références bibliographiques:
-
Sources archivistiques:
- AD Doubs, 1C 1312, lettre de Choiseul du 18 juin 1762 et dossier sur les receveurs de traites de Bresse.
- AD Rhône, 1C 248, affaire Buinand, juin 1714.
- AN, G1 115, dossier 4 : commission de receveur du tabac.
-
Sources imprimées:
- Déclaration du Roy portant peine de mort contre les commis aux receptes générales et particulières et autres ayant le maniement des deniers des fermes du Roy, lesquels seront convaincus de les avoir emportez, données à Versailles le 5 mai 1690.
- Arrêt de la Chambre de justice contre Chartier, receveur des traites foraines de Vichy, condamné d'être pendu, pour avoir détourné des deniers royaux et commis nombre de concussions et exactions et contre les nommés Marcou et La Bellonie, ses commis, bannis pour neuf ans, 19 janvier 1717.
- Édit du Roy portant suppression de tous les receveurs des fermes et controlleurs des dépôts, donné à Paris au mois de juin 1717.
- Arrêt du Conseil d’Etat qui casse celui de la Cour des Aides de Rouen du 14 août précédent, déclare nulle, injurieuse et tortionnaire la saisie-exécution et vente des meubles du sieur Guérin de Vitry, receveur du quart-bouillon à Avranches et ordonne la restitution des sommes qu’il aurait pu être contraint de payer, 26 novembre 1776.
Receveur particulier » (2023) in Marie-Laure Legay, Thomas Boullu (dir.), Dictionnaire Numérique de la Ferme générale, https://fermege.meshs.fr.
Date de consultation : 22/12/2024
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