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Ecrou pour fraude

Momcilo Markovic





Trop souvent, la prison de la Conciergerie à Paris est associée au Tribunal révolutionnaire de l’an II, véhiculant depuis plus de deux siècles une image macabre. Pourtant, tout au long de la période moderne, au XVIIIe siècle notamment, la Conciergerie demeure une « prison ordinaire » qui accueille des prisonniers qui sont en attente d’un jugement ou de l’exécution d’une peine criminelle. Ce sont des détenus de droit commun, jugés en premier ressort dans leur généralité respective avant qu’une sentence définitive soit prononcée en appel. La Conciergerie conserve cependant une certaine particularité, car, à côté de cette masse d’individus, une autre catégorie de personnes subit les affres de l’emprisonnement où la geôle voit défiler chaque jour des personnes inculpées pour fraude, emmenées en prison par les employés de la Ferme.

Le plaisir de boire n’est pas défendu. Ce qui l’est, en revanche, c’est la fraude sur les boissons ou la contrebande de tabac et de faux sel, car de nombreux Parisiens évitent de payer les lourdes taxes afférentes aux boissons. Le commerce frauduleux est important en cette fin du XVIIIe siècle à Paris et la population profite des lieux qui sont insuffisamment contrôlés par les employés de la Ferme. La clôture fiscale, le Mur des Fermiers généraux, encore en construction au début de 1789, est en partie responsable de cette situation, car les passages, non encore édifiés, permettent aux habitants de faire circuler, en toute discrétion et en toute illégalité, du vin et d’autres boissons. Les procédés sont multiples et dévoilent l’ingéniosité des trafiquants : pendant qu’un individu transporte une vessie remplie d’eau-de-vie, cachée sous le manteau, d’autres hommes, du côté de la banlieue, balancent par-dessus le Mur des Fermiers des vessies pleines qui sont vite réceptionnées par les fraudeurs, du côté de la ville. Certains, profitant de la nuit, transportent sur leurs épaules des barils remplis de vin qu’ils emportent discrètement dans un cabaret à l’intérieur de la Ville-Lumière. Les fraudeurs exploitent ces rues tortueuses, ces jardins et bâtiments qui communiquent pour apporter des quantités importantes d’alcool ; on construit même des tuyaux souterrains, installés sous la chaussée, dans lesquels on fait passer les liquides alcoolisés.

Ces actions frauduleuses comportent des risques et nul n’est à l’abri d’une interpellation menée par les employés de la Ferme. Débute alors pour le fraudeur l’enfermement carcéral qui le conduit tout droit à la Conciergerie, la prison de l’île de la Cité. Cependant, avant la fatidique incarcération, les règles de procédure sont scrupuleusement respectées par les commis de la Ferme qui ont déjà dressé un procès-verbal de fraude ou de rébellion, en cas de résistance. L’individu est ensuite conduit par quelques hommes de la Ferme (la plupart du temps, le brigadier, le sous-brigadier et des subalternes) où il est écroué. Ainsi, « écrouer quelqu’un, c’est le constituer prisonnier et en faire mention sur le registre des prisons ». L’action d’écrouer constitue donc une « opération d’enregistrement du prisonnier, sans laquelle la contrainte par corps exercée sur un individu est illégale ».

Conservés aux Archives de la Préfecture de Police de Paris, les registres des prisonniers de la Conciergerie constituent des séries quasi continues entre 1564 et 1794 et demeurent une source riche et incontournable pour les historiens qui cherchent à mieux cerner la politique criminelle et répressive du Parlement. L’ordonnance criminelle de 1670 précise, dans son titre XIII, les règles de l’enregistrement des détenus qui se vérifient à la lecture des registres. Le greffier partage chaque feuillet en deux colonnes : sur celle de droite, il y porte les informations relatives qui président à l’incarcération de l’individu ; la colonne de gauche indique la sentence rendue. Toutefois, les personnes écrouées pour fraude ou contrebande ne connaissent pas le même traitement scriptural que les autres prévenus ; l’écrou affiche ainsi une volonté délibérée de dissocier les individus incarcérés.

Le premier type d’écrou, que nous nommerons « l’écrou classique », se distingue du deuxième, « l’écrou pour fraude ». Pour le premier écrou, le format de la date est classique avec le jour (en chiffres) et, en lettres, le mois et l’année ; l’acte mentionne, avec des caractères plus grands et en gras, l’état civil de l’accusé, suivi de son âge, son activité, son domicile et son lieu de naissance ; ensuite, le greffier indique la condamnation prononcée par la juridiction d’origine et la nature du délit ou du crime. Sur la colonne de gauche, le greffier note l’arrêt définitif prononcé en appel par le Parlement de Paris. L’écrou pour fraude (ou contrebande) diffère sensiblement ; là, le greffier inscrit la date entièrement en lettres en commençant par l’année, suivi de l’heure à laquelle l’individu est présenté à la Conciergerie. Le greffier désigne la juridiction pour le compte de laquelle l’arrestation est effectuée ; dans les cas qui nous intéressent, il s’agit toujours de l’adjudicataire général (l’homme de paille) des Fermes du roi. Le patronyme (quelquefois le surnom uniquement) apparaît plus bas et, assez régulièrement, le nom de la personne incarcérée est souligné. L’écrou se termine par une observation sommaire de la nature du délit de fraude. Enfin, le fraudeur est « écroué sur le registre de la geôle des prisons de la Conciergerie, et laissé à la charge et garde du sieur Hubert, concierge d’icelle qui s’en est chargé aux peines de droit, dont acte ». À ce moment, les employés qui conduisent l’inculpé signent sur le petit registre (de nuit ou de jour). APP, AB 128, vue d’ensemble du registre de la Conciergerie, entre le 6 et le 9 janvier 1786 (cliché de l’auteur).

« La levée d’écrou » (cliché de l’auteur).APP, AB 128, ordonnance rendue le 28 janvier 1786 par Marye, premier président de l’Élection, qui met en liberté provisoire Alexandre Lecoeuvre, et délivre un décret d’ajournement personnel. [L’homme, un ancien employé des Fermes, fut écroué le 10 janvier 1786, en vertu d’un décret de prise de corps décerné le 17 décembre 1785 par l’Élection de Paris. Tôt ou tard, la Conciergerie se vide de ses prisonniers. Ne nous attendons pas à ce qu’il y ait des règles strictes dans le domaine des libérations, car tout dépend de la fraude constatée et surtout de la résistance opposée aux forces de la Ferme. Il existe, principalement, trois cas de figure à la levée d’écrou d’un individu emprisonné pour fraude : en premier lieu, l’élargissement du prisonnier est effectué « en vertu de la mainlevée par Monsieur Delaître [Bernard Delaître est en poste à l’hôtel de Bretonvilliers, le siège de la Ferme ; il sera assassiné en 1792 dans son château de Charonne, à Paris], directeur général des entrées de Paris [et du plat-pays] ».

  

  On distingue nettement sur chaque feuillet les deux colonnes. Pour les détenus de droit commun, sous la date de l’écrou, apparaît clairement en caractères gras l’état civil de la personne ; pour les individus incarcérés pour fraude, c’est l’année qui ressort en premier lieu.

L'écrou pour fraude (cliché de l'auteur. APP, AB 128, écrou de Pierre Degrè, le 9 janvier 1786, pour fraude et rébellion

  

  N’apparaît ici que la colonne de droite, à savoir l’écrou. L’homme est remis en liberté 15 mois plus tard, le 5 avril 1787. La durée d’incarcération est exceptionnellement longue ; généralement, la détention excède rarement 3-4 mois. En réalité, le parcours judiciaire de Pierre Degrè (ou Desgrais) fut tumultueux : à peine écroué, l’homme subit un interrogatoire devant le premier président de l’Élection. Le 25 janvier 1786, un décret de prise corps est décerné ; la Cour des Aides, prenant le relais de l’instruction, condamna Pierre Desgrais le 9 janvier 1787 « à être attaché trois jours consécutifs au carcan à un poteau qui sera planté le premier jour à la barrière Saint-Denis, le deuxième jour à la barrière Saint-Martin et le troisième jour à la barrière du Temple ; et y rester chacun des trois jours de midi à deux heures de relevée ». Après avoir subi cette peine infamante, typique de l’Ancien Régime, l’individu retourne à la Conciergerie avant d’être définitivement relâché en avril 1787.

   Le procès-verbal délivré à l’encontre du suspect, à l’occasion de l’interpellation, précise les formes prescrites de l’incarcération où les employés doivent obligatoirement amener l’individu « entre les deux guichets » (endroit entre les deux portes où se tiennent les guichetiers, les préposés du geôlier) ; à cet instant, l’homme n’est pas encore à proprement parler un prisonnier et il est censé encore conserver sa liberté. Les employés de la Ferme rédigent alors l’acte en sa présence, le lisent, puis demandent au prévenu de le signer (ce que ce dernier refuse très souvent), et lui remettent une copie sur du papier timbré. Enfin, l’individu est confié à la charge du concierge et il intègre réellement la prison. On ne peut qu’être frappé par la tenue remarquable des registres par les greffiers. L’écriture cursive, fluide et lisible, est celle d’un professionnel qui manie la plume avec dextérité et la lecture est aisée au contraire de la rédaction de la plupart des procès-verbaux pour fraude. Deux greffiers, au moins, sont désignés pour la tenue des registres d’écrou comme en témoigne la différence d’écriture : de manière générale, l’un écroue alors que l’autre, le greffier des geôles, élargit le prévenu. Encore faut-il nuancer ces propos, car, là aussi, celui qui écrou un individu jugé en appel n’est pas le même greffier qui écroue en cas de fraude. L’ordonnance de 1670 ne fait nulle mention de ces pratiques normatives de l’écrou, suggérant un traitement distinct des détenus à la Conciergerie, en identifiant clairement ceux qui sont des fraudeurs et ceux qui ont interjeté appel d’une sentence. Les législations royales (ordonnances, édits, arrêts) sont muettes sur ces variétés de l’écrou. Ces transformations, plutôt empiriques, témoignent, sans doute, d’une volonté de classement, afin de mieux identifier les individus.

  Si la très grande majorité des individus incarcérés sont pris en flagrant délit de fraude, d’autres sont emprisonnés sur une décision de justice, acte qui se traduit en amont par un décret de prise de corps. Celui-ci est par conséquent un jugement rendu par une juridiction. Cette forme de décret est rigoureuse puisqu’elle prive une personne de liberté. Il existe deux types de décrets délivrés par la cour qui précèdent la prise de corps : le décret d’assigné pour être ouï, et le décret d’ajournement personnel. Le premier oblige une personne à se présenter devant le juge pour y subir une audition, sans qu’il existe des charges formelles à l’encontre de l’intéressé ; ce dernier peut cependant écoper d’une condamnation pécuniaire. La deuxième situation, l’ajournement personnel, est très souvent délivrée lorsque la personne assignée ne se rend pas à la convocation de la cour. Enfin, le décret de prise de corps (l’équivalent du mandat de dépôt ou d’arrêt) entraîne l’incarcération. Lorsque le tribunal de l’Élection convertit un décret d’ajournement personnel en prise de corps, l’individu est appréhendé et entendu par le magistrat. Ces situations se retrouvent régulièrement dans les écrous de la Conciergerie lorsque des particuliers portent plainte contre des employés de la Ferme pour mauvais traitements. L’huissier de justice, à verge ou à cheval, muni du décret de prise de corps, procède à l’arrestation de l’employé qui est interrogé par un magistrat ; le décret de prise de corps rétrograde à un niveau inférieur, redevenant un décret d’ajournement personnel, mais ne constitue pas, pour autant, une décharge des accusations portées. Quand l’individu se constitue volontairement prisonnier, sachant qu’un décret de prise de corps est décerné, il voit son statut se transformer en simple décret d’assigné. Régulièrement, l’Élection rend une sentence qui équivaut à une condamnation. Cependant, l’emprisonnement n’est pas immédiat et il faut attendre quelques semaines, voire plusieurs mois avant que l’huissier ne délivre le décret de prise de corps à l’intéressé. L’incarcération prend du temps, car il faut retrouver les individus qui ont pu, entre-temps, déménager ou donner une fausse adresse ; l’huissier de justice devient alors enquêteur.

« La levée d’écrou » (cliché de l’auteur).APP, AB 128, ordonnance rendue le 28 janvier 1786 par Marye, premier président de l’Élection, qui met en liberté provisoire Alexandre Lecoeuvre, et délivre un décret d’ajournement personnel. [L’homme, un ancien employé des Fermes, fut écroué le 10 janvier 1786, en vertu d’un décret de prise de corps décerné le 17 décembre 1785 par l’Élection de Paris.

  

  Tôt ou tard, la Conciergerie se vide de ses prisonniers. Ne nous attendons pas à ce qu’il y ait des règles strictes dans le domaine des libérations, car tout dépend de la fraude constatée et surtout de la résistance opposée aux forces de la Ferme. Il existe, principalement, trois cas de figure à la levée d’écrou d’un individu emprisonné pour fraude : en premier lieu, l’élargissement du prisonnier est effectué « en vertu de la mainlevée par Monsieur Delaître [Bernard Delaître est en poste à l’hôtel de Bretonvilliers, le siège de la Ferme ; il sera assassiné en 1792 dans son château de Charonne, à Paris], directeur général des entrées de Paris [et du plat-pays] ». Cette mainlevée (ou main-levée) s’oppose évidemment à la main de justice qui « ordonne en contraignant les personnes et procédant sur leurs biens ». Dès lors, les dépositaires de l’ordre ont le pouvoir de saisir les biens d’une personne et, le cas échéant, de les emprisonner ; souvent, les deux aspects vont de pair, puisque les employés confisquent l’objet de la fraude et écrouent l’individu.

   La mainlevée est la situation qui se rencontre majoritairement dans les registres de la prison. Les écrous signalent deux types de mainlevées qui permettent soit une libération sous caution, soit un élargissement définitif. Dans le premier cas, la liberté est provisoire, à la charge de l’inculpé de se représenter à tous les actes de la procédure dès qu’il en sera requis. Le deuxième cas est favorable au prévenu puisque la mainlevée n’est susceptible d’aucune opposition et elle est délivrée sans cautionnement puisqu’elle rend la liberté à l’individu. À la Conciergerie, la mention d’une mainlevée sous caution ou définitive n’apparaît jamais. On peut estimer qu’une incarcération de plusieurs semaines est en soi une punition suffisante dans le cas d’une fraude qui n’entraîne pas un acte de rébellion ; la Ferme se résout alors à libérer l’individu sans attendre une quelconque contrepartie financière, la saisie des boissons, en cas de fraude, ayant déjà eu lieu au moment de l’arrestation par les employés de la Ferme. Le deuxième cas de figure est à chercher dans la coutume qui joue un rôle non négligeable. Dans cette société encore imprégnée de catholicisme, le pardon des fautes demeure un acte important. En dehors des grâces royales, où le roi pouvait casser le jugement des cours souveraines, les juridictions financières possédaient ce pouvoir régalien, délégué par le monarque. Il n’est donc pas surprenant que les grandes fêtes religieuses soient l’occasion d’un pardon en masse. Lors des quatre grandes fêtes religieuses (Noël, Pâques, la fête de la Vierge Marie et la Toussaint), les officiers de la Cour des aides descendaient dans le préau de la Conciergerie et graciaient un nombre assez conséquent de prisonniers. Ainsi, pour l’année 1786, plus de 100 personnes bénéficient de ces mesures de clémence pour les diverses célébrations catholiques où l’accusé est « mis en liberté et hors des prisons de céans par messieurs de la Cour des aides y tenant leurs séances à cause de la révérence des fêtes [de Pâques] et en vertu de la mainlevée de ce jourd’hui ; signé de monsieur Delaitre, directeur général des entrées de Paris ».

  Enfin, d’autres écrous, minoritaires, attestent d’un troisième cas de figure où le premier président de l’Élection possède la faculté de rendre la liberté à l’issue d’une ordonnance de justice, toujours suivie de la mainlevée (ou du consentement) de l’adjudicataire des Fermes. Ici, les attributions de l’Élection sont composées essentiellement d’affaires de contentieux des taxes indirectes. Les magistrats peuvent également traduire devant leur juridiction les commis de la Ferme dans l’exercice de leurs fonctions ; au criminel, comme en témoignent abondamment les écrous, les magistrats de l’Élection se chargent des rébellions contre les employés.

  Entre le début de l’édification du Mur des Fermiers généraux en 1785 et la suppression de l’octroi aux entrées des villes en 1791, votée par l’Assemblée, la fraude et la contrebande à Paris étalent la répression exercée par la Ferme et les juridictions financières. Il n’est pas excessif de dire que la Conciergerie demeure la prison des fraudeurs. La punition est réelle, la sanction est forte. En effet, en 6 ans, ce sont 1553 individus qui sont écroués, dont les trois-quarts sont des hommes. Chaque année, entre 1785 et 1790, près de 260 personnes sont incarcérées. Les arrestations sont d’un niveau égal entre 1785 et 1787 (une moyenne de 270), mais explosent en 1788, avec près de 500 personnes, soit deux fois plus que les années précédentes. L’année reste un moment sombre pour les supposés fraudeurs : avec une moyenne de 40 personnes écrouées chaque mois, la prison héberge autant de détenus de droit commun que de fraudeurs durant l’été 1788. Les captifs pour fraude atteignent alors 40% de l’effectif total. Puis, le nombre baisse fortement, tombant à moins de 200 arrestations en 1789. Encore faut-il relativiser les chiffres bas de 1789 : entre le 8 juillet et le 11 août 1789, aucune arrestation n’est opérée et le deuxième semestre de l’année n’enregistre que 11 écrous. Une remarque similaire s’impose pour l’année 1790 où seulement 77 personnes sont écrouées pour fraude. Cela coïncide avec les événements révolutionnaires parisiens, combinés avec la mise en place de nouvelles règles de procédure de justice qui se traduisent par un net assouplissement répressif, malgré la continuité juridique de l’administration de la Ferme et des anciennes juridictions financières. Les écrous pour l’année 1791 sont insignifiants, ne comptant que 6 détenus en janvier à la Conciergerie. Quelques semaines plus tard, l’Assemblée nationale supprimait définitivement les taxes aux entrées des villes ; il n’y a donc plus aucune barrière d’octroi à surveiller ni d’arrestations à réaliser en ce début d’hiver 1791. APP 128-129-130, les détenus pour fraude à la Conciergerie (1785-1791).

Nombre de détenus pour fraude à la Conciergerie (1785-1791)

  

  Du plus petit délit – le refus de subir un contrôle des employés – jusqu’à la rébellion avec violences, en passant par la fraude d’alcool, la prison conserve cette large panoplie des violations aux règles et lois, où les pratiques illicites sont sévèrement réprimées. Outre l’intérêt indéniable à déchiffrer ces « papiers de justice » où une histoire quantitative peut s’appliquer à une catégorie de délinquants, donnant à voir une politique répressive de la Ferme et des cours de l’Élection et des Aides, les écrous pour fraude à la Conciergerie déploient d’autres dimensions, culturelles et sociales, où la description des faits et des actes juridiques répond à un besoin croissant d’un enregistrement particulier, en individualisant, classant et hiérarchisant les individus écroués. Ainsi, on ne doit pas négliger cette « histoire matérielle du droit de punir » qui participe autant au savoir sur la violence et la délinquance à la Conciergerie.





Sources et références bibliographiques:

    Sources archivistiques:
  • Archives de la Préfecture de Police ou APP : les registres d’écrou à la Conciergerie (AB 128 : 12 mars 1785-12 décembre 1786, AB 129 : 14 décembre 1786-20 janvier 1789, AB 130 : 21 janvier 1789-26 janvier 1792).
  • AN, Z1G 211, Information contre Pierre Desgrais, accusé de fraude et rébellion (P-V. des commis du bureau du Temple, interrogatoire de Desgrais, audition des commis de la Ferme, sentence de l’Élection, arrêt de la cour des Aides).

    Sources imprimées:
  • Ordonnance de Louis XIV. Roy de France et de Navarre. Donnée à Saint-Germain en Laye au mois d’août 1670. Pour les matières criminelles.
  • Encyclopédie méthodique. Jurisprudence. Tome quatrième, Paris/Liège, Panckoucke/Plombieux, 1784, « écrou », p. 200.
  • Pierre-François Muyart de Vouglans, Les loix criminelles de France dans leur ordre naturel. Dédiées au roi, 1780.
  • Encyclopédie méthodique. Jurisprudence. Tome quatrième, « guichet », p. 831.
  • Encyclopédie méthodique. Jurisprudence. Tome sixième, « prise de corps », p. 789.
  • Encyclopédie méthodique. Jurisprudence. Tome premier, « ajournement », p. 254.
  • Encyclopédie méthodique. Jurisprudence. Tome cinquième, « main de justice » et « mainlevée », p. 677.
  • Jean-Joseph Expilly, Dictionnaire géographique, historique et politique des Gaules et de la France, tome 5, Amsterdam, 1764, « Paris » (pour le pardon des fautes), p. 538.


    Bibliographie scientifique:
  • Pascal Bastien, L’exécution publique à Paris au XVIIIe siècle. Une histoire des rituels judiciaires, Seyssel, Champ Vallon, 2006.
  • Stéphanie Blot-Maccagnan, Procédure criminelle et défense de l’accusé à la fin de l’Ancien Régime. Étude de la pratique angevine, Rennes, PUR, 2010.
  • Jean-Marie Carbasse, Histoire du droit pénal et de la justice criminelle, Paris, PUF, 2014.
  • Frédéric Chauvaud, Pierre Prétou (dir.), L’arrestation. Interpellations, prises de corps et captures depuis le Moyen Âge, Rennes, PUR, 2015.
  • Camille Dégez, Un univers carcéral (XVIe-XVIIe siècles) : la prison de la Conciergerie et sa société, thèse soutenue à l’université Paris IV, 2005.
  • Camille Dégez, « La mémoire de la prison : les greffiers de la Conciergerie (Paris, fin du XVIe siècle-milieu du XVIIe siècle) », dans Olivier Poncet, Isabelle Storez-Brancourt (dir.), Une histoire de la mémoire judiciaire. De l’Antiquité à nos jours, Paris, Publications de l’Ecole nationale des chartes, 2009, p. 233-243.
  • Julie Doyon, « Ecrouer et punir. Les registres de la Conciergerie au siècle des Lumières », dans Michel Porret (dir.), Histoire matérielle du droit de punir. Bois, fers et papiers de justice, Genève, L’Equinoxe, Georg, 2012, p. 48-76.
  • Benoît Garnot, Histoire de la justice. France, XVIe– XXIe siècles, Folio histoire, 2009.
  • Momcilo Markovic, Paris brûle ! L’incendie des barrières de l’octroi en juillet 1789, L’Harmattan, 2019, p. 97-117.




Citer cette notice:

Momcilo Markovic, « Ecrou pour fraude » (2023) in Marie-Laure Legay, Thomas Boullu (dir.), Dictionnaire Numérique de la Ferme générale, https://fermege.meshs.fr.
Date de consultation : 21/11/2024
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