Vis-à-vis de ces toiles dont la fabrication, l’importation
et le port furent prohibés
entre 1686 et 1759, la Ferme générale agit
essentiellement comme agent de contrôle et de répression.
La loi visait non seulement les toiles peintes à
l’étranger, mais aussi les toiles blanches susceptibles
d’être imprimées en France, les mousselines, les toiles
mêlées de coton et de lin. Comme l’ont montré de nombreux
historiens, la contrebande de ces toiles très demandées par les consommateurs
français sévit dans tout le royaume. La compagnie dut
lutter contre des réseaux très puissants qui écoulaient
frauduleusement la production marseillaise, seule ville autorisée à
produire le calicot, dans toute la Provence, mais aussi la production suisse et la production
anglaise de toiles
imitées des indiennes ; elle lutta aussi contre les
réseaux illicites organisés à partir des arrivages de la
Compagnie des Indes à Lorient
ou à partir des réexpéditions hollandaises. La répression
fut définie par de nombreux arrêts prévoyant des peines
afflictives (la
peine de mort pour tous les contrebandiers selon l’arrêt
du 11 octobre 1720 ou l’édit
d’octobre 1726…) et des peines
pécuniaires élevées (l’édit de juillet 1717 les fixa à 3 000 livres). De son côté,
la Ferme générale dut renforcer ces bureaux de contrôle,
parfaire les modalités de saisies traitées au bureau des marchandises prohibées à
Paris, mais aussi préciser les modalités de partage entre
ses employés des profits générés par ces captures (arrêt
du 1er février 1724,
délibération du 7 octobre 1752). Elle recouvra son rôle d’agent fiscal en 1759 (lettres patentes du 28
octobre) et 1760 (arrêt du 19
juillet), lorsque l’importation fut autorisée moyennant de
drastiques droits d’entrée : 150 livres le quintal pour
les toiles imprimées (soit 25 % de leur valeur), 90 livres
le quintal pour les toiles peintes commercées par la
Compagnie des Indes, 75
livres le quintal pour les toiles blanches (soit 15 % de
leur valeur). Dans le même temps, les toiles blanches de
lin, de chanvre ou de coton furent exemptées de tout droit
de traites lorsqu’elles
devaient circuler à l’intérieur du royaume. Onze bureaux
d’entrée furent désignés ; par mer : Bayonne, Bordeaux, Nantes, Le
Havre et Rouen, auxquels il faut
ajouter la ville basse de Dunkerque ; et par terre : Valenciennes,
Saint-Dizier, Pont-de-Beauvoisin, Septèmes et Jougne en Franche-Comté. Les mesures s’imposaient tant aux toiles en
pièces qu’aux toiles en coupons. Ces tarifs prohibitifs
continuèrent d’encourager la contrebande qui sévissait déjà au temps de
l’embargo. De Suisse
notamment venaient les toiles indiennes meilleur marché
que celles fabriquées en France, c’est pourquoi le
bureau de Versoix
fut ajouté par décision du 30 janvier 1770. L’assouplissement de la
législation fut lent, mais régulier. Il concerna surtout
les toiles de coton blanches du Levant qui alimentaient
les manufactures provençales. A partir du 22 mars 1767, elles acquittèrent les
mêmes droits que celles provenant du commerce de la
compagnie des Indes. En
1772, le roi résolut de
baisser les tarifs (respectivement ramenés à 90, 60 et 50
livres le quintal), tout en réactivant les quatre lieues limitrophes dans
lesquelles tout magasin était interdit. Les toiles passant
par les bureaux de
Saint-Dizier, Jougne, Pont-de-Beauvoisin et Septèmes ne
pouvaient y être non plus entreposées. Comme pour d’autres
marchandises prohibées, le régime se durcit de nouveau
dans les années 80. L’arrêt du 10 juillet 1785 interdit l’introduction
dans le royaume des toiles de coton blanches ou écrues, de
celles de fil ou coton, mouchoirs, bakins et toiles de
Nankin fabriquées dans l’Inde ou à l’étranger, autres que
celles qui provenaient de la compagnie des Indes ou des retours à
Lorient des vaisseaux particuliers. Marseille demanda alors
la liberté pour les toiles de coton blanches provenant
directement du Levant, ce
qui lui fut accordé, à la charge que lesdites toiles
n’eussent de plus grande largeur que 5/8 d’aunes et
qu’elles payassent au
bureau de Septèmes 50 livres par
quintal et y recevront un plomb intitulé « toiles de coton
blanches de commerce français du Levant ».
Sources et références bibliographiques:
Sources archivistiques:
AD Doubs, 1C
1313, lettre de Bertin, 17 novembre 1763/toiles
peintes soit en pièces soit en coupons assujetties
aux plombs ou marques de fabrique (Lettres
patentes de 1759 et arrêt du 19 juillet 1760).
AN, G1 15,
Délibération de la compagnie des Fermiers
généraux.
AN, G1 79, dossier
16 dossier 21 (« Etat des marchandises dont
l’entrée est fixée par certains bureaux »).
AN, G1 80, dossier
7, Régime suivi pour les toiles de coton depuis
1785.
Sources imprimées:
Examen des avantages et des
desavantages de la prohibition des toiles peintes,
Marseille, chez Carapatria, 1755.
Arrêt du Conseil d’Etat qui modère
les droits d’entrées sur les toiles peintes ou
imprimées venant de l'étranger fait défenses d'en
tenir magasin ou entrepôt dans les 4 lieues des
frontières et attribue au Lieutenant général de
police à Paris et aux intendants des provinces la
connaissance de toutes les saisies desdites toiles,
13 août 1772.
Arrêt du Conseil d’Etat du roi qui
renouvelle les anciennes défenses d’introduire dans
le royaume, aucunes toiles de coton mousselines
venant de l’Etranger, autres que celle de l’Inde
apportées pour le commerce national, et interdit le
débit des Toiles peintes, gazes et linons de
fabrique étrangère, sauf le délai fixé pour celles
existantes dans le royaume, 10 juillet 1785.
Bibliographie scientifique:
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et au XVIIIe siècle. Industrie. Commerce.
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Citer cette notice:
Marie-Laure Legay, « Toiles de coton (blanches, peintes et imprimées) » (2023) in Marie-Laure Legay, Thomas Boullu (dir.), Dictionnaire Numérique de la Ferme générale, https://fermege.meshs.fr. Date de consultation : 21/11/2024
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