Marie-Laure Legay
Dans ce contexte, les
provinces septentrionales présentaient une situation
particulière. La Flandre, le Cambrésis, le Hainaut et pays conquis disposaient du privilèges de transit
pour la circulation des marchandises, par exemple entre
Dunkerque et Ypres
(cinq pour cent de la valeur des marchandises étaient
levés au lieu des tarifs douaniers ordinaires) ou pour la
circulation sur les rivières et canaux entre ces provinces
et l’étranger effectif
(cinq sous par cent pesant seulement au lieu des tarifs
douaniers ordinaires), l’emprunt de la Meuse et le passage
par Givet étant soumis à une tarification particulière.
Avec les habitants et négociants de l’Artois, ceux de ces provinces septentrionales avaient
la liberté de transit pour les marchandises issues de
leurs manufactures ou pour les matières premières qu’ils
faisaient venir par Bayonne, Septèmes, Pont-de-Beauvoisin et Langres : elles ne payaient aucun droit d’entrée
et de sortie, aucun péage, aucun droit local, mais les
acquits à caution devaient
être enregistrés au
bureau de Douai (bureau transféré à
Lille en 1713) pour les
matières premières, ou au bureau de transit de Péronne
pour la sortie (Amiens et Saint-Quentin devinrent bureaux
de transit à partir de 1738).
En 1746 par exemple, le
bureau de Péronne, dernier bureau de la route, vérifia un
chargement venu de Nîmes censé contenir des étoffes de
soie destinées à la Flandre espagnole, mais en réalité composé de bûches de
bois et de sable. La sanction de la Cour des aides
de Paris fut exemplaire : les négociants Jean Soubeyran et
François Molines furent condamnés à régler 7 080 livres
pour la valeur de la marchandise substituée, et 2 000
livres en sus pour les infractions commises. Avec le
développement des exemptions de droits sur l’exportation
des marchandises du royaume comme les toiles, pièces de
bonneterie, chapeaux ou tapisseries, le droit substitutif
du transit devint moins intéressant.
Le port de Marseille
enserré dans la Provence ne bénéficia pas des mêmes avantages que Dunkerque. Les
marchandises issues du Levant réglaient les droits de sortie pour traverser le
pays (dispositions des arrêts du 18 juillet 1670, 10 septembre 1678, 26 octobre 1680 et 15 septembre 1704). Quelques exceptions
furent néanmoins concédées comme en 1769 sur les toiles de laine, poils de
chèvres et chameaux orientales qui bénéficièrent du droit
de transit en déclarant au bureau de Poids
et casse la destination
étrangère et le bureau de sortie. Toutefois, les
négociants marseillais, soutenus par les procureurs du
pays de Provence, n’obtinrent pas plus d’exemption.
L’intrication étroite des terres du duché de
Lorraine dans la généralité des
Trois-Evêchés avait également nécessité
la mise en œuvre d’un droit généralisé de transit. Le traité de 1718 accorda le privilège aux
Lorrains pour les marchandises de leur cru et,
réciproquement, les négociants du Barrois disposaient du
droit de transit sur les routes du duché.
Les marchandises prohibées pouvaient également circuler dans la généralité de
Metz à condition de respecter des
formalités strictes (acquits à caution, plombs…). Absente
de cette province des Trois-Evêchés
« à l’instar de l’étranger effectif », la Ferme générale
ne pouvait pas contrôler les convois. Le
gouvernement confia donc à l’intendant de Metz
l’inspection de bureaux de transit établis sur la
route de Verdun (à Cousonvoy, Mouzon et Verdun), sur
la route d’Arlon à Longwy, sur la route du
Luxembourg à Thionville, Sierck sur la Meuse et
Vaudrevange sur la Sarthe, sur la route de Francfort
à Metz, sur la route de Sarrebruck à Teting, et un
bureau à Vic. La géographie fiscale se
compliquait des avancées de la Champagne, pays des Cinq grosses fermes qui ne pouvait être traversé par des
marchandises prohibées, dans les
Trois-Evêchés, entre Saint-Dizier et
Neufchâteau. En 1771, les
toiles peintes de Philibert
Cornu furent saisies sur la route royale de Neufchâteau à
Bar-le-Duc, du côté de Tréveray, après le bureau
champenois de Saint-Joire, comme n’étant pas déclarées.
Sources et références bibliographiques:
Marie-Laure Legay, « Transit » (2023) in Marie-Laure Legay, Thomas Boullu (dir.), Dictionnaire Numérique de la Ferme générale, https://fermege.meshs.fr.
Date de consultation : 20/05/2024
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