Quatre paroisses enclavées dans le pays d’Auge
disposaient comme en pays de Quart-bouillon
voisin, du privilège de fabriquer du sel blanc :
Saint-Arnoult, Saint-Pierre et Saint-Thomas de Touques,
ainsi que Trouville. En tout 24 salines, reconnues par
l’ordonnance des gabelles de mai 1680
(article 39 du titre XIV) fonctionnaient. Elles se
répartissaient entre le Grand-Marais (dix salines),
Marais-l’Evêque (sept salines) et Marais de Trouville
(sept). Ces salines ne devaient bouillir que deux jours
par semaine, avec une répartition entre chaque marais
arrangée entre la Ferme et les sauniers : le lundi et le
mardi pour le Grand-Marais, le mercredi et jeudi pour le
Marais-l’Evêque et le vendredi et samedi pour le Marais
de Trouville. La production annuelle était limitée à 145
boisseaux par saline, soit 3 480 boisseaux (ou 87 025
livres). Chaque jour, le saunier devait déposer le sel
fabriqué au magasin établi à Touques. En chemin, il était
escorté par un employé de la Ferme. Le Fermier, qui en
possédait une clé, devait enregistrer les quantités
journalières et le prix était fixé par une sentence des
officiers du grenier
d’Honfleur à dix livres quatre sous la ruche du poids de 50 livres.
Comme ailleurs, les dispositions de l’ordonnance de 1680 ne furent pas strictement
suivies. Les Fermiers généraux réagirent tardivement, en
1758, pour réclamer un
enregistrement effectif des quantités déposées. Les
sauniers durent se soumettre au choix à la pesée ou au
mesurage de leur sel. Ils firent appel aux juges du
grenier
d’Honfleur qui les exemptèrent de cette
formalité. La Cour des aides de Rouen confirma la sentence,
ce qui engagea les Fermiers généraux à réclamer un arrêt
du Conseil pour cassation. Quant à la distribution,
celle-ci révélait un enchevêtrement de privilèges
complexe : sur les quarante-six paroisses qui pouvaient
user de ce sel de Touques, quatre seulement en disposaient
pour le pot et salière et pour les salaisons :
Saint-Thomas, Saint-Pierre de Touques, Trouville et
Bonneville. Les quarante-deux autres étaient assujetties à
l’impôt au grenier
d’Honfleur ou de Danestal. Elles n’utilisaient le sel du
dépôt de
Touques que pour une petite partie de
leur consommation, encore que les nobles et
ecclésiastiques de ces paroisses pouvaient aller y
chercher jusqu’à la moitié de leurs besoins, tandis que
l’évêque de Lisieux pouvait en tirer 36 boisseaux
(privilège converti en franc-salé en 1697). La distribution était donc savamment calibrée en
fonction de la production, somme toute faible. Les
marguilliers des paroisses tenaient des rôles d’habitants
pour répartir la distribution qui se faisait par
particulier ou par paroisse sur extrait de ces rôles et
certificat du curé. La régie des salines de Touques
percevait les droits, à hauteur de une livre 18 sous et 5
deniers le boisseau en 1763.
On comptait un employé principal qui tenait les registres,
un commis aux quêtes et une
brigade.